Comment l’IA transforme-t-elle concrètement la Qualité ? Optimisation des processus, simplification du reporting, implication des collaborateurs ou encore modification du PDCA, nous vous expliquons concrètement tous ces changements.
Les informations de cet article sont tirées d’un webinaire animé par PYX4.

Technologies émergentes : MCP et Agentique
Le MCP
Les IA comme ChatGPT ou les LLM sont excellents pour répondre à des questions, générer du texte ou déboguer du code, mais restent passives. Elles ne se connectent pas aux applications et ne réalisent pas d’actions concrètes à notre place. Le gain de temps reste donc limité.
C’est précisément ce que vient commencer à résoudre le MCP (Model Context Protocol). Jusqu’ici, les intégrations reposaient sur des API, utiles certes, mais loin d’être simple :
- chaque application peut avoir une API différente
- les développeurs doivent créer des intégrations sur mesure
- la moindre mise à jour peut tout casser
Le MCP harmonise la communication entre deux applications. Il est pensé pour être utilisé en langage naturel.
Au lieu de demander à un développeur de coder l’intégration entre YouTube et Slack pour générer le résumé d’une vidéo, vous pouvez simplement écrire :« Résume cette vidéo YouTube et prépare un brouillon d’e-mail pour ma Direction dans Outlook. »
L’IA comprendra :
- où aller chercher le document (Google Drive, OneDrive…),
- quel service de messagerie vous utilisez (Gmail, Outlook…),
- quelles actions doivent être effectuées dans quelles applications.
Et surtout, le MCP permet à l’IA d’exécuter une suite d’actions, et pas seulement une action figée comme le ferait une intégration classique.
En bref, le protocole MCP donne la structure mais ce qui permet réellement à l’IA de l’exploiter et d’agir de manière cohérente, c’est l’IA Agentique.
L’Agentique
L’Agentique est capable de communiquer avec plusieurs applications. Il a la réflexion et la capacité d’enchaîner plusieurs étapes.
Après une demande, l’Agentique déconstruit le message et l’associe à des actions spécifiques :
- consulter un document : envoyer la requête à la GED ou à l’outil documentaire
- rédiger et envoyer un mail : passer par Gmail ou Outlook
- récupérer une information : se connecter à un autre service compatible
C’est le “cerveau” qui prend l’information, la décompose et attribue chaque tâche à chaque application grâce au MCP.
Les deux travaillent donc globalement ensemble.
Quels changements l’IA apporte-t-elle à la Qualité ?
L’IA est capable de réaliser de nombreuses tâches :
- résumer et simplifier
- analyser un contenu
- classer et retrouver l’information
- générer du texte clair et structuré
En revanche, il y en a certaines qu’elle ne devrait pas faire sans contrôle :
- prendre une décision à votre place
- garantir l’exactitude d’un document ou d’une information qui vient de sortir
- comprendre le contexte implicite d’une situation
En effet, une IA ne connaît pas les processus internes, l’historique et la politique de votre entreprise. Elle ne peut donc pas prendre de décision sans connaître le fonctionnement de votre organisation.
💡 L’intelligence artificielle ne dispose pas de responsabilité morale, c’est pourquoi elle doit toujours être sous le contrôle de la personne qui l’utilise.
Que peut faire l’IA pour la Qualité ?
Optimiser les processus
L’IA permet d’identifier les inefficacités des processus, de proposer des améliorations et surtout de le faire de manière la plus automatisée possible. L’idée est de faire progresser la maturité des processus selon les référentiels connus, comme ceux issus de la FD X 50-176.
Concrètement, il s’agit de passer d’un niveau “maîtrisé” (où les processus sont simplement documenté), à un niveau suivi et proactif (où l’analyse quasi en temps réel permet de détecter les écarts et d’optimiser les pratiques).
Personnaliser les standards Qualité
Les IA permettent d’exploiter la documentation du SMQ (Système de Management de la Qualité) d’une organisation afin de personnaliser l’application des standards qualité tels que l’ISO 9001.
Une fois les processus bien décrits, l’IA peut analyser l’organisation pour identifier :
- les exigences applicables à son contexte
- les zones de non-conformité ou de risque
- les actions de mise en conformité les plus pertinentes
L’IA transforme alors un référentiel générique en recommandations adaptées aux enjeux de l’entreprise.
Impliquer les collaborateurs dans la Qualité
Proposer ces nouveaux outils aux collaborateurs permet de montrer que la Qualité n’est pas un domaine “en retard”, mais un domaine qui s’appuie pleinement sur les innovations technologiques.
Cela permet :
- de garder les nouveaux arrivants connectés aux pratiques actuelles, voire d’en faire des prescripteurs internes
- d’impliquer les équipes hors Qualité, car les outils proposés se rapprochent de ce qu’ils utilisent déjà dans leur vie quotidienne
On peut imaginer par exemple un chat interne connecté au SMQ et à la documentation métier. Grâce à des algorithmes d’IA, il pourrait permettre à tous les collaborateurs de retrouver rapidement l’information dont ils ont besoin.
Simplifier le reporting
L’IA peut également faciliter la création du reporting, à condition que les données soient correctement documentées, structurées et configurées dans l’organisation. L’IA peut alors générer un reporting automatisé, en temps réel, sans dépendre d’exports manuels ou de manipulations à réaliser à date fixe.
Quels sont les acteurs à impliquer ?
Pour déployer l’IA dans de bonnes conditions, il est essentiel de réunir les bonnes personnes :
- Les métiers et responsables qualité :
Les pilotes de processus et référents qualité sont indispensables pour s’assurer que les prédictions de l’IA sont utiles et exploitables. Sans leur expertise terrain, une prédiction peut rester inutile. Leur rôle est de cibler ce qui apporte de la valeur, notamment lors de l’analyse des processus.
- L’adhésion des pilotes et de la Direction :
Leur soutien est crucial pour faciliter l’adoption par l’ensemble des collaborateurs. Comme pour toute démarche de transformation, le succès repose sur l’adhésion des équipes et le sponsoring de la direction.
- Les équipes Data et Architecture :
Elles transforment les données en capacité prédictive, garantissent la faisabilité technique et la scalabilité des solutions. Sans elles, le projet ne peut pas aboutir.
- La sécurité et conformité :
Le respect de la confidentialité des données est primordial, notamment au regard du RGPD. Les DPO et experts sécurité doivent être impliqués pour prévenir tout risque lié aux données sensibles.
En résumé, la réussite d’un projet IA en Qualité repose sur une coordination entre métiers, qualité, data, direction et partenaires externes, chacun apportant son expertise pour maximiser la valeur et minimiser les risques.
Autres usages de l’IA
Assistance aux audits
L’IA permet de générer automatiquement des checklists contextualisées à chacun de vos audits mais aussi de pré-remplir vos rapports en extrayant les informations des précédentes inspections.
Formation et onboarding
Avec l’IA, il est possible de créer des tuteurs virtuels qui vont se baser quasiment sur votre LMS interne, vous allez avoir toute votre culture, vos processus et tout ce qui convient de transmettre à un nouvel arrivant pour former vos équipes de manière interactive, personnalisée.
Moteurs de recherche documentaire (RAG)
Les moteurs de recherche basés sur le Retrieval-Augmented Generation (RAG) permettent un accès beaucoup plus rapide et pertinent aux processus et à la documentation métier.
Le principe repose sur une structuration fine de l’information : les contenus sont fragmentés, indexés et vectorisés. Cela permet à l’IA de retrouver précisément les éléments les plus pertinents, sans avoir à parcourir des documents entiers.
Cette approche transforme profondément la recherche documentaire. Elle fonctionne de manière plus logique et contextuelle, à l’image des évolutions déjà observées dans les moteurs de recherche grand public, offrant des résultats mieux hiérarchisés et directement exploitables.
En structurant vos données sous forme de fragments d’information, les systèmes RAG facilitent une recherche rapide, intelligente et adaptée aux besoins spécifiques de votre organisation, qu’il s’agisse de processus, d’articles internes ou de documentation métier sur l’intranet.
Traduction contextualisée
L’IA permet de réaliser des traductions multilingues plus précises tout en conservant les terminologies propres à votre organisation. Aujourd’hui, les traductions automatiques classiques restent souvent insuffisantes, surtout lorsque le vocabulaire métier est spécifique ou qu’il n’existe pas de base de connaissances dédiée.
Comment l’IA fait évoluer le PDCA ?
L’IA vient transformer légèrement le cycle PDCA. Bien que les quatres grandes étapes restent les mêmes, c’est leur ordre qui va changer, puisqu’on va parler de PCAD :
- Plan : collecter et surveiller en continu
On définit les processus, leurs paramètres et on établit les critères de conformité et les indicateurs de performance, en lien avec la réglementation en vigueur et les référentiels de certification.
Grâce à l’IA et aux systèmes de collecte (capteurs, outils numériques…) cette dernière devient continue et offre un diagnostic quasi permanent et automatisé.
- Check : vérifier les résultats, détecter les écarts et analyser la performance
Avec l’IA, on va disposer de modèles qui détectent instantanément les anomalies et nos écarts par rapport aux standards. Cela va permettre de faire tout ça, encore une fois, quasi en temps réel, de manière continue, sans attendre un audit ou un contrôle. Le tout, dans le cadre de vos opérations habituelles.
- Act : décider de l’action corrective
Grâce à l’IA, il va être possible de proposer les meilleures actions correctives ou préventives possibles en fonction des données historiques, des patterns détectés, des contraintes du moment. On va être dans une démarche qui va être accéléré comparativement à ce qu’on a l’habitude de faire.
- Do : Agir automatiquement ou assister l’intervention
Nous aurons un système qui automatise un certain nombre d’actions comme le déclenchement de workflow par exemple. L’IA va permettre d’automatiser un grand nombre de choses et ainsi réorganiser la manière de travailler.
Voici ce que l’IA change par rapport à un PDCA classique :
- le cycle n’est plus mensuel, mais en temps réel
- le check devient beaucoup plus puissant grâce au prédictif
- le act bénéfice d’un retour d’expérience global, pas seulement local
- le do peut-être totalement automatisé
- le PDCA s’auto améliore
C’est un PDCA augmenté, un PCAD en boucle continue rapide et piloté par les données.
Quels sont les risques et contraintes de l’IA ?
Exposition involontaire de données sensibles
Chaque jour, nous utilisons des outils comme Google pour faire des recherches. Ce faisant, nous acceptons implicitement de fournir des données en échange d’une réponse. C’est un accord tacite : “je te donne de l’information, tu me rends un service”. Bien souvent, on se dit que ce n’est pas grave, que la recherche n’est pas sensible, que l’essentiel est d’obtenir rapidement une réponse.
Le sujet devient plus critique avec l’intelligence artificielle. Car on commence à lui confier des données confidentielles, privées, parfois même stratégiques. Des développeurs, par exemple, peuvent transmettre du code propriétaire, développé en interne, qui n’a jamais été publié sur Internet. Une fois envoyé à une IA, ce code est ingéré, exploité, sans que l’on sache précisément comment.
Le problème réside dans le manque de contrôle : les données peuvent être analysées, réutilisées, ou conservées, sans visibilité ni maîtrise. Tant que la donnée sort de notre périmètre, ce risque existe.
Face à cela, deux options s’offrent aux organisations :
- Ne jamais transmettre de données critiques à une IA externe.
- Héberger sa propre IA. De plus en plus d’entreprises s’y engagent, en s’appuyant notamment sur des modèles open source, comparables à ChatGPT, mais déployés sur des environnements internes, cloisonnés, parfois même sans accès à Internet.
Cela permet de mettre à disposition des collaborateurs une IA fermée, maîtrisée, où aucune donnée ne sort de l’organisation. Cette approche soulève évidemment des questions de maintenance, d’évolution des modèles… et surtout de coûts. Car si l’utilisation d’outils comme ChatGPT est aujourd’hui peu onéreuse, héberger ses propres serveurs, équipés de cartes graphiques capables de gérer des centaines ou des milliers d’utilisateurs, représente un investissement bien plus conséquent.
Il est donc très important de responsabiliser ses équipes sur la criticité de la donnée.
Bais amplifiés
L’IA n’est pas infaillible, et il ne faut pas lui accorder une confiance aveugle, tout comme aux entreprises qui la développent.
Par exemple, fin 2023 et début 2024, DeepSeek, une intelligence artificielle chinoise particulièrement performante a connu un grand succès lors de son lancement. Pourtant, dès lors qu’on l’interrogeait sur des sujets sensibles liés à la Chine, comme le travail forcé ou certaines questions politiques, elle éludait les réponses, voire fournissait des informations erronées.
Cela illustre un point fondamental : les biais peuvent être intégrés volontairement dans les modèles, qu’ils proviennent d’un État, d’une entreprise ou de toute entité à l’origine de l’IA. Une intelligence artificielle peut être orientée, politisée, et conditionnée à produire certains discours plutôt que d’autres.
Il faut donc partir d’un principe simple : une IA n’a pas “raison”. Elle propose une réponse, formule une recommandation, tente de guider. Mais elle ne détient pas la vérité. Plus que jamais, l’esprit critique est indispensable face aux informations qu’elle fournit.
Surestimation des capacités de l’IA
Le premier risque est de surestimer les capacités réelles de l’IA. On peut penser que tout est en place : l’IA est utilisée, les outils sont bien paramétrés, le PDCA (ou PCDA) fonctionne parfaitement. Sur le papier, tout semble fluide. Mais en réalité, parvenir à ce niveau de maturité demande de nombreuses étapes, et aujourd’hui très peu d’entreprises peuvent réellement affirmer avoir pleinement déployé ces démarches.
Dans le même temps, les attentes augmentent fortement sans que les ressources humaines ne suivent nécessairement. On part du principe que, puisque de nouveaux outils existent, puisque l’IA est là, les équipes deviennent des « travailleurs augmentés » et qu’il n’est donc plus nécessaire d’être aussi nombreux qu’avant. Cette logique alimente d’ailleurs une crainte largement partagée : celle du remplacement de l’humain par la machine.
La réalité est plus nuancée. Oui, les outils sont performants. Mais encore faut-il former les équipes à leur utilisation. Or, la formation demande du temps, du budget et de l’énergie. Il faut également piloter le déploiement, suivre son avancement, fixer des objectifs cohérents. On ne peut pas imaginer qu’une solution d’IA, fraîchement mise en place, permette du jour au lendemain une automatisation totale et immédiate.
Ces sujets représentent des investissements importants, à la fois humains et financiers. Ces démarches sont coûteuses, s’inscrivent dans la durée et nécessitent un véritable pilotage.
Il faut donc être prêt à investir, à suivre ces investissements dans le temps et à mettre en place une réelle conduite du changement. Les professionnels de la Qualité y sont souvent sensibilisés, car habitués à ce type de transformation.
Acceptabilité interne
Se pose également la question de l’acceptabilité en interne. La crainte d’une substitution de certains métiers par des robots reste très présente. La conduite du changement est indispensable.
Il est essentiel de former et d’accompagner les acteurs, en leur montrant que l’intelligence artificielle est avant tout un outil, et non un substitut. Ce sont bien les humains qui portent la responsabilité des choix effectués. La responsabilité juridique reste du côté de l’organisation et de ses acteurs, notamment en cas de préjudices liés à l’utilisation de l’intelligence artificielle.
Pour conclure, certaines applications sont aujourd’hui très intéressantes. Par exemple, les RAG (retrieval-augmented generation) sont faciles à mettre en place, peu coûteuses en ressources et peuvent fonctionner localement. Elles limitent quasiment totalement les « hallucinations » des IA, puisqu’elles ne répondent qu’à partir d’une base de connaissances spécifique.
Les usages sont nombreux et prometteurs :
- Analyse et reporting des processus, détection d’anomalies ;
- Surveillance réglementaire et suivi de l’évolution des normes ;
- Assistance lors des audits et identification de points de vigilance.
Ces outils peuvent nous rendre plus performants et plus efficaces, nous permettre d’apprendre plus vite, mais ils ne remplacent pas l’humain. La prise de décisions stratégiques reste entièrement sous notre responsabilité. L’IA est là pour nous aider, pour augmenter nos capacités, pas pour les substituer.
Image à la Une : James Yarema – Unsplash








